Voici plus de trois ans, depuis sa présentation à Madrid, en février 1972, que » La Cuadra » presque sans relâche, a présenté son travail, » Ouejio » en de nombreux pays d’Europe et d’Amérique latine devant les publics les plus différents, public » festivalier « , villageois des hameaux isolés du Nord du Portugal, habitants des ranchos de Caracas ou des banlieues misérables de Bogota ou Mexico.
En trois ans de professionnalisme – non parce que les membres du groupe sont des professionnels du spectacle, mais parce que, depuis qu’est né » Quejio » ils ont vécu de leur labeur théâtral. Le langage employé comme moyen de communication et l’origine sociale de ses membres font de » La Cuadra » un groupe à part dans l’histoire du théâtre espagnol.
Tous, ils appartiennent à la communauté gitane andalouse, prolétariat marginal, réunis un jour autour de l’un d’eux, Salvador Tavora, pour réaliser avec lui une idée, un schéma étrange auquel ils donnent corps. Gens du peuple qui portent leur lutte èn avant sans mimétismes esthétiques d’aucune sorte, occupat les scènes et montrant leur vérité.
Le langage employé par le groupe est un langage séculaire, un art né de la peur, de l’humiliation ou de la joie désespérée des occasions exceptionnelles : le chant et la danse au travers desquels durant quatre siècles, la communaute gitane andalouse a crié son amertume et son impuissance ; chants et danses transmis de père en fils, confondant la plainte gitane originelle avec celle d’une bonne partie du prolétariat et paysannat andalous ; chants, danses et guitare convertis en instruments expressifs de la chronique populaire de la communauté marginale.
La méthode du groupe ne naît pas d’un compromis intellectuel, mais d’une réalité socio-culturelle, de la découverte qu’il leur était possible de créer, en employant leur langage artistique spécifique, un théâtre de leur réalité.
Le travail s’inscrit dans la lutte générale que de nombreuses communautés populaires mènent contre la colonisation culturelle. Le groupe a voulu que son langage, celui des siens, revînt au lieu qui lui correspond historiquement et politiquement. li veut dire que ce langage est fils de nécessités vitales, de douleurs séculaires, et ils apportent ainsi au théâtre la poétique du chant.