Céline est aussi adulé qu’honni. Il est le pacifiste qui a dénoncé les horreurs de la Grande Guerre et l’homme qui s’est compromis avec les plus extrémistes des collaborateurs sous l’Occupation. Bien avant ses pamphlets antisémites, il signe avec Voyage au bout de la nuit, un chef-d’œuvre de l’entre-deux guerres. Un texte des plus noirs qui révèle sa vision pessimiste du monde, entre une Europe en feu, une Afrique gangrénée par le colonialisme et une Amérique en marche vers l’aliénation par le travail. Un récit à la première personne – celui de Bardamu, héros-narrateur, soldat réchappé de l’enfer de la Grande Guerre –, un « roman-voix » qui tranche et qui s’impose.
VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT : un style unique entre immédiateté de la parole jetée sur la page et tenue d’une plume qui choisit ses mots. La comédienne Hélène Firla, cigarette roulée vissée entre les lèvres, large costume d’homme et chapeau melon, incarne Bardamu. Le héros de Céline interprété par une femme… Une trouvaille imaginée par le metteur en scène belge Philippe Sireuil, qui, avec cette admirable adaptation scénique, restitue au texte son étrangeté, sa grandeur, sa violence.
