VIVRE VITE

Le titre le suggère bien, ces adolescents veulent «tout, tout de suite», ils veulent, comme dit le réalisateur, «avaler la vie d’une seule bouchée, sans s’inquiéter des conséquences de leurs actes, en vivant passionnément la vie, fuyant toute attache, tout lien qui puisse restreindre la liberté individuelle ». La liberté est le point primordial et essentiel de leur credo, et la drogue (dont Saura déclare qu’elle devrait être en vente libre, aux risques et périls des acheteurs) est un des moyens de cette liberté d’où les attaques à main armée pour se procurer l’argent nécessaire… Saura prend acte de cette dramatique réalité avec, apparemment, beau-coup de sang froid. Ce qui explique le côté quasi-documen-taire de son film, son absence de pathétique comme de moralisme, son regard froid sur la criminalité juvénile qu’il décrit au terme d’une minutieuse enquête personnelle dans les ban:ieues de Madrid parmi les adolescents qui sont les héros de son fim et dont il a sélectionné quatre représen-tants à partir d’une série de conversations directes. L’indiscutable et convaincante authenticité de son film tient à sa méthode d’approche du problème : utilisation de non professionnels qui vivent sur l’écran leur propre réalité, tournage entièrement en décors réels, absence complète de dramatisation au niveau de l’expression filmique. Si VIVRE VITE est moins ambitieux, moins complexe que ses grands films, il a le mérite de témoigner lucidement et fortement sur une réalité qui nous harcèle. Marcel Martin
(La revue du Cinéma/image et Son, avril 81)