Les Petites Fugues

Grâce à un vélomoteur payé avec une assurance vieillesse, Pipe (Michel Robin), valet de ferme dans une famille de petits exploitants agricoles va mettre un terme à trente ans de soumission en s’ouvrant à une autre vie. Avec la ferveur d’un primitif qui découvre la technologie, Pipe va apprendre à rouler puis à « décoller » de son quotidien prosaïque à l’occasion des petites fugues qu’il se ménage de plus en plus fréquemment. Ces virées superbes, vécues comme une suite d’aventures picaresques (Pipe en visite à l’usine, Pipe et les motards, etc…) vont le faire passer de l’état de sujétion à l’état d’être autonome. Il va faire entrer le désir, celui de la découverte, des rencontres, d’un « ailleurs » dans le champ, jusque là clos, de son existence abrutissante. Sur un scénario somptueux, Yves Yersin a enchevêtré, avec une efficacité exemplaire, différents procédés de narration, sans que les uns perdent de leur force au profit des autres. À l’observation naturaliste de la vie à la ferme il mêle le ton de la fable (des fugues de Pipe). Sans jamais appuyer le pittoresque du personnage, sans aucun procédé artificiel pour créer le suspens, fa beauté de l’envoûtement naissent de la dimension métaphorique qu’atteint le film.