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Les Bonnes

Les Bonnes… encore ?
Oui mais…
… jouées par des Acteurs-Centaures, mi-animaux, mi-humains, comédiens à cheval… étranges, vrais, fragiles et terrifiants…
Oui mais…
… une version totalement nouvelle et étonnante qui donne une couleur brutale et un rythme inattendu aux mots somptueux de Genet, transformant cette lente cérémonie morbide en rituel sensuel…
… et maintenant,fermez les yeux et imaginez…
… Madame, sur son cheval blanc se dressant comme une citadelle imprenable. Ses deux bonnes montées sur leurs superbes chevaux frisons noirs Toutes trois, enserrant entre leurs cuisses une montagne de chair et de nerfs frémissante et bondissante dans la violence indissociable de l’amour et de la haine…
Un chant qui galope la crinière au vent.

Les Bonnes

NOUVELLE création de l‘Ankinéa Théâtre, cette pièce écrite en 1947 est tirée d’un fait divers : celui de deux sœurs employées de maison qui assassinèrent leur maîtresse. Enchaînées socialement à leur statut de bonnes, et amoureuses de Madame, elles attendent une reconnaissance qu’elle n’obtiennent pas. Cette attente provoque une frustration affective qui développe leur haine, haine qu’elles transcendent en devenant tour à tour Madame.

« Après l’immensité du texte de Wolfgang Borchert, Dehors, devant la porte, il m’a fallu revenir à une forme plus réduite, à un espace clos avec une unité de temps, de lieu en cherchant à appréhender ce que Borchert m’a appris : le sentiment de liberté. Paradoxalement, cette envie m’amène à choisir de travailler sur Les Bonnes, symbole de l’enfermement. J’aime à penser que les réponses se trouvent dans les paradoxes, à l’intersection
et à la confrontation des opposés.
 » Franck Berthier

LES BONNES

La chambre d’une femme riche. lit, commode, coiffeuse, profusion de fleurs. Cette femme parle à sa bonne avec une insolence outrée, sonnant faux. Elle lui manifeste une véritable haine, une violente répulsion. Parfois même le dialogue déraille carrément. Le ton, monté trop haut, fléchit, De brefs moments d’abandon Interviennent. Oubliant leurs situations respectives, les deux femmes se laissent aller jusqu’à se tutoyer, à donner des mar­ques d’une étrange complicité. Soudain vient le tour de la servante. Elle exprime, avec la même furieuse et invraisemblable violence, le dégoût de son humble condi­tion. A l’instant où, ayant atteint le paroxysme de la rage, elle paraissait être sur le point d’étrangler sa patronne, retentit la sonnerie criarde et déplacée d’un réveil. Le Jeu doit prendre fin. Car c’était bien un jeu. ou plutôt, les deux rôles étant tenus par deux bonnes. un psychodrame spontané. La vraie maîtresse mainte­nant va rentrer. Il faut tout ranger en vitesse. Oter la jolie robe, rendosser la vieille défroque, la vieille peau. Les bonnes, tout à coup, se sentent singulièrement lasses. Elles craignent qu’une négligence ne les trahisse. Elles se reprochent mutuellement leur impuissance et leur folie. Genet a souligné là un chose très Importante frustrées, malheureuses, les bonnes sont pleines de fiel. Elles se débattent en vain, chaque jour plus lourdes d’une rancune qui les empoisonne. Cette rancune, elles la crient. Cela les soulage un peu, mals ne les délivre pas. De même (et cette idée a déjà été soulignée par Brecht) la gentillesse superficielle, bon marché et com­plaisante de leur patronne ne leur met aucun baume au cœur. Cela lui est facile, clament-elles avec dépit. Elle est belle, riche, almée. Rien ne la contrarie. Qu’est-ce qui l’empêche de se payer, par surcroît, le luxe de la douceur et d’une relative bonté ? Cette petite joie s’ajoute à celles qu’elle a déjà. Démolir cet abri douillet où elle rosit et èngralsse. Provoquer sa déconfiture, sa débâcle. Voir cet aimable contentement se transformer en hargne crispée… La tentation est irrésistible. Les bonnes y succombent. Mals elles sont si mal armées, comment pourraient-elles réussir ? Condamnées à un demi-esclavage, elles sont en même temps réduites à une quasi-enfance, de sorte que, mal informées du monde et de ses lois, elles ne peuvent concevoir qu’un projet totalement dépourvu de réalisme, et qui échoue lamen­tablement…