Charles, dans LE DIABLE, c’est le héros bressonnien enfermé dans le monde d’aujourd’hui. C’est en quelque sorte Lancelot jeté vif dans un drugstore. Sans doute ne ressemble-t-il pas aux « jeunes » que le cinéma nous présente habituellement. Encore moins à ceux que nous voyons autour de nous. Ce n’est pas plus une essence ou une abstraction, un symbole, tout juste une condensa-tion de signes de la jeunesse actuelle autour d’un « modèle ». Ce que, une fois de plus, Bresson met en jeu, c’est le désir du spectateur. Désir de voir plus. Plus d’espace. Plus de temps. Plus d’événement. Donc plus de sens. Mais d’un sens donné au départ, pré-établi, dont le film ne serait que le réceptable, le catalyseur. Ce que dit Charles (que seul un héros de Bresson peut dire et de cette façon, et qu’aucun être « réel » ne dirait), c’est son désir. Sa formulation de l’absolu. Son appel à la transcendance, à l’autre. Ce que filme Bresson, c’est son échec face à une société qui ne le reconnaît plus en tant qu’individu, qu’un. Société dont les divers moyens d’action, d’oppression sont présents : police, prêtres, psychanaliste, famille. Mais surtout et avant tout l’argent, qui envahit douloureusement toutes les communications, qui supplée aux liens réels entre les êtres.
LE DIABLE PROBABLEMENT
Distribution
Film français (1977) de Robert BRESSON |