Quartett

C’est la première fois que nous accueillons une mise en scène de Matthias Langhoff et c’est pour nous une grande chance de présenter son travail au public chablaisien. Grinçant, dénonciateur, explosif, son théâtre est à son image. Brutal car sans illusions, il mêle à une lucidité froide la folie d’un carnaval aux masques tragiques ou railleurs. De Lausanne à Berlin en passant par Genève, Paris ou Barcelone, l’artiste n’a pas connu de lieu fixe depuis 1985. Et si ses conceptions n’ont pas toujours été comprises ni admises, il a toujours préféré déranger, bousculer, surprendre. Le choix de Ouartett, le texte le plus joué d’Heiner Müller, n’est en ce sens pas innocent, comme il l’explique : Le Quartett de Müller vaut la peine d’être redécouvert il est sauvage, jeune et destructeur, cruellement comique et troublant au plus haut point.

Heiner Müller écrit Quartett en 1980, d’après le roman Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos. Il reprend dans son texte virtuose toute la thématique du roman, y bousculant les idées reçues ; il mêle le sexe, le pouvoir et la mort.
Que reste-t-il aux deux protagonistes pour mener ce dernier combat, leur dernière paflde amoureuse ? Ni tendresse, ni illusion, ni plaisir de la chair. A force de s’étriper et de se griffer, il ne leur reste que les béances de leurs corps vieillis et la violence des mots. Mots dont ils jouent magistralement dans leur dernière joute. Connaissant jusqu’aux plus petits plis, recoins, du corps et de l’âme de l’autre, ils s’entredévorent à coup de fantasmes, se perdent pour mieux se retrouver. Le texte de Müller prend en jeu les fantasmes, l’érotisme pervers des deux aristocrates en bout de course. Une danse de mort baroque jusqu’au vertige.