La Compagnie Emilie Valantin et le comédien Jean Sclavis explorent l’un des monuments de Shakespeare. En voilà une version marionnettique dans laquelle le rôle d’Hamlet est tenu par une femme, et où l’attention se resserre sur la tragédie personnelle et familiale : toute la manipulation destructrice qu’exerce le spectre du père sur son fils Hamlet…
Dans un mise en scène où le costume élisabéthain (l’Angleterre du 17e siècle) règne avec délicatesse, les deux comédiens orchestrent la farce sur un rythme trépidant, manipulent tous les personnages, marionnettes à taille humaine d’un réalisme bluffant. Une magnifique relecture de cette pièce devenue mythe, avec en filigrane la question suprême : qui manipule qui ?
L’Histoire. Quelques années après sa mort, le spectre du roi du Danemark apparaît à son fils Hamlet et en appelle à la vengeance. Il lui révèle que son meurtrier n’est autre que son propre frère, Claudius, oncle d’Hamlet qui vient d’épouser Gertrude, veuve du roi et mère d’Hamlet. Avec la complicité de son ami Horacio, Hamlet fait donner une représentation théâtrale pour démasquer Claudius, le nouveau Roi devant la Cour. Dès lors, il déclenche une suite de tragédies en chaine. Le spectre hante les consciences…
Hamlet au féminin ? Jean Sclavis choisit de creuser une hypothèse étayée par de nombreuses analyses psychanalytiques, qui parient sur la féminité ou la bisexualité d’Hamlet. Ce parti pris apporte un éclairage nouveau sur le couple que forment Hamlet et Horacio, et expliquerait également l’attitude d’Hamlet envers Ophélie. C’est donc un regard nouveau sur cette œuvre monumentale que livre ici l’une des compagnies les plus emblématiques de l’art de la marionnette en France.
» Cet Hamlet… est présenté par la Cie Émilie Valantin, une des papesses de la création marionnettique mondiale. S’attaquer à ce fameux texte de Shakespeare est assez culotté et cette adaptation vaut le déplacement. Hamlet, ce personnage hanté par le spectre de son père, est interprété par la comédienne-manipulatrice anglaise bilingue, Claire Harrison-Bullett. Eh oui, selon certains universitaires portés sur la psychanalyse, Hamlet serait en réalité une femme. Faisons comme si. Le plausible nous suffit. Il est fascinant de voir Jean Sclavis – metteur en scène et scénographe – jouer le rôle du spectre. L’homme est aussi le manipulateur principal des marionnettes, richement vêtues de face, noires lorsqu’elles sont de dos. Ainsi celle de la Reine Gertrude, du Roi Claudius, du Fossoyeur, du Prêtre, des courtisans Rosencrantz et Guildenstern, ou encore d’Ophélie… Jean Sclavis est un fantastique homme-orchestre et Claire Harrison-Bullett une… remarquable Hamlet. » – Anthony Palou, Le Figaro, 23/9/2021