Cyrano de Bergerac

Jeune ou vieux, ignorant ou connaisseur, il n’y a pas un seul français qui aille à la rencontre de Cyrano de Bergerac sans un vaste souvenir au coeur, sans au moins une tirade, un vers, une rime, un élan, une larme à retrouver, avec le plaisir de la reconnaissance qu’offrent les mélodies familières. On ne voit pas le chef-d’oeuvre de Rostand, on le guette. Plus étendue que pour les classiques en dépit des programmes scolaires, cette sympathie spontanée, presque atavique et jamais démentie depuis bientôt soixante dix ans, a pris force de loi. N’en déplaise aux sucrés et aux doctrinaires, entre un théâtre destiné aux masses et un théâtre aussi largement ratifié par elles, le plus populaire des deux n’est peut-être pas celui qu’on pense. Popularité suspecte ? Si l’expression a un sens ce serait faire injure à l’auteur et au public de l’employer ici. Peu d’accords entre la scène et la salle se sont fondés sur une communauté aussi saine, aussi profonde d’émotions et de rêves. Le français a une tendresse pour l’esprit frondeur, l’humour bravache, le chagrin méconnu. Rostand aussi, où est le mal ?
Bertrand POIROT DELPECH – LE MONDE.

Le spectacle le plus divertissant du moment ? Incontestablement. Cyrano de Bergerac ce n est pas autre chose en effet qu’une suite de morceaux de bravoure, d’images détachées de quelque histoire de cape et d’épée. Jouer le jeu c’est donner de ces vers faciles et claironnants la possibilité de ne plus être ce qu’ils sont : une fanfare pour défilé de beaux sentiments. Comment refuser de se laisser emporter alors ? Tout le monde a droit aux beaux sentiments, à l’héroisme qui gonfle les poitrines, ci l’esprit frondeur qui se venge en riant des médiocrités, de l’émotion qui embue les yeux. André ALTER – TEMOIGNAGE C’HRETIEN