« C’est en tournant NOTRE DAME DE PARIS que j’ai rencontré les «gens du voyage». Ils jouaient des passions. Cette découverte fut décisive pour la suite, mais sur le moment j’ai poursuivi ma carrière à l’écran. J’étais connu, riche. Une idée pourtant faisait son chemin : monter une troupe, partir comme les saltimbanques. J’en parlai à mes amis proches : Gérard PHILIPPE , avec qui je tournai LE JOUEUR et Albert CAMUS dont vous pouvez imaginer le prestige pour ma génération. PHILIPPE me présenta à Jean VILAR. Lui aussi avait eu cette idée, puis renoncé, vu l’expérience financièrement catastrophique du premier directeur du T.N.P. de Chaillot, Firmin GÉMIER, en 1911 ! ça ne m’a pas découragé. Je me suis mis à dessiner l’architecture d’un chapiteau léger, comme marin je connaissais bien les problèmes de voiles, de treuil. Entre temps, je fis une tournée avec une jeune troupe et un FEYDEAU : ce fut mon chemin de Damas. Je savais que dorénavant, je ne ferai plus jamais autre chose ».
Propos de Jean DANET, recueillis par Michel BOUÉ A.T.A.C. / Mars 78
BEAUMARCHAIS est, on l’a dit souvent, un dramaturge «amateur». Cet homme d’affaires et d’argent ne recherche dans les lettres qu’un «délassement honnête». Aussi son oeuvre est-elle mince : cinq parades, trois drames, un opéra et deux comédies seulement, le tout étalé sur trente cinq ans environ. Mais cet amateur est un passionné qui veut que tout ce qu’il entreprend réussisse, que ce soit une spéculation hardie, un procès ou une comédie. Aussi dépense-t-il toute son énergie, toute son intelligence, pour assurer le succès de ses entreprises. Il a un art de la mise en scène et de la publicité unique en son temps : interdictions, lectures, guerre de billets, préfaces, sont au-tant de moyens qu’il exploite pour lancer ses oeuvres dans le public, avec un génie consommé de l’intrigue. Et de fait, les premières représentations de ses deux comédies (LE BARBIER DE SÉVILLE en 1775 et LE MARIAGE DE FIGARO en 1784) sont dans l’histoire des théâtres deux «événements», deux « victoires personnelles».
La Comédie au XVIII ème siècle
Résumé de la pièce par BEAUMARCHAIS : «La plus badine des intrigues. Un grand seigneur espagnol, amoureux d’une jeune fille qu’il veut séduire, et les efforts que cette fiancée, celui qu’elle doit épouser, et la femme du seigneur réunissent pour faire échouer dans son dessein un martre absolu que son rang, sa fortune et sa prodigalité rendent tout puissant pour l’accomplir. Voilà tout, rien de plus. La pièce est sous vos yeux.» La satire politique et sociale : «La donnée de la pièce est déjà, par elle-même, assez hardie puisqu’elle met au centre de l’action le «mariage d’un domestique» et qu’elle oppose le martre et le valet rivaux d’amour pour «donner tort au maître». La satire sociale est donc naturellement vive et porte loin puisqu’elle s’appuie sur une réaction du public en face des personnages, et même qu’elle détermine une part de l’intrigue. De plus la valeur satirique du sujet est doublée de toutes les pointes qu’à travers Figaro, l’esprit frondeur de Beaumarchais lance contre les «abus de toutes sortes» d’ordre social et plus discrètement d’ordre politique… Le théâtre redevient avec Beaumarchais une grande Tribune.»
Pierre VOLTZ