LE ROI & L’OISEAU

« Allô ! Allô ! Forte récompense ! Allô ! Allô ! Une char­mante bergère et un petit ramoneur de rien du tout… de rien du tout … sont recherchés par la police de Sa Majesté, le roi Charles Cinq et Trois font Huit et Huit font seize de Takicardie … Allô ! Allô !… forte récompense… ».
« Le Roi et l’Oiseau » est bien un film de Grimault et Prévert.
Dès le début, tandis que l’ascenseur s’élève au 96° étage du palais royal, le liftier énumère – comme dans un grand magasin – ce que l’on trouve à chaque étage. « Inventaire » superbe et cocasse, auquel ne manque qu’un raton-laveur… Dans l’appartement secret de Sa Majesté, un peintre met la dernière main au portrait du Roi. Mais il oublie de le mettre en cage (comme le dessin de l’oiseau dans un poème célèbre de Jacques Prévert). Et le portrait, qui est l’âme damnée du Roi, supprime son modèle et prend sa place. Du coup, l’essence des choses se révèle, l’inexprimable peut s’expri­mer. Les tableaux représentant une Bergère et un Ramoneur s’animent.
Ils s’avouent leur amour. Mais le Roi est amoureux de la Bergère et « les enfants qui s’aiment » doivent se sauver, poursuivis par la police et secourus par l’Oiseau-moqueur…
Comment dire le charme de ce film ? Non, ni les couleurs, ni le graphisme ne sont d’une extrême nouveauté. Mais ils sont si frais, si sincères qu’ils nous enchantent. Comme nous enchantent les voix de Piéplu et de Bussières. Et les quelques chansons de Prévert et de Kosma.
Un grand dessin animé français qui ne doit rien aux bandes dessinées, on ne croyait plus que ce fût possible. Mais si. Seulement, il aura fallu à son auteur trente-trois ans de ténacité !…
Claude Marie Trémois (Télérama)