LA création en 1976 de l’Ensemble Inter Contemporain répondait à une né-cessité : diffuser la musique contemporaine sans plus se contenter de la programmer de façon marginale au hasard d’occasions plus ou moins coupées du contexte général de la vie musicale. Ensemble de solistes, il s’attache tout à la fois à diffuser les classiques contemporains, qui en réalité sont « classiques » par le verbe plus que par les faits, et à créer et imposer progressivement, par la répétition et la reprise, un répertoire nouveau. Certaines oeuvres sont donc régulièrement reprogrammées afin que s’élargisse le cercle des auditeurs. La vocation de l’Ensemble Inter Contemporain est aussi pédagogique. Une bonne diffusion de la musique contemporaine exige un effort d’information. C’est pourquoi, aux concerts de forme traditionnelle, s’ajoutent des stages, des séminaires, des ateliers qu’organise le secteur Anima-tion et Pédagogie de l’Ensemble, en liaison avec les intéressés. Un aspect original de l’Ensemble Inter Contemporain réside dans l’échange constant qui s’établit entre compositeurs et instrumentistes, surtout à l’occasion des créations. Unit iation peut se produire aux deux pôles de la création : si d’un côté les oeuvres nouvelles posent souvent des problè-mes inédits de jeu et d’ensemble, en retour les instrumentistes, par lei participation active au travail de recherche peuvent proposer des solutie inédites aux compositeurs. L’Expérimentation musicale et les recherches scientifiques menées a l’I.R.C.A.M. (Institut de Recherche et de Coordination Acoustique-Musique) trouvent dans la collaboration suivie avec les musiciens de l’Ensemble Inter Contemporain un terrain d’application pratique. Chercheurs et musiciens peuvent ainsi définir avec plus de précision des objectifs communs et réalistes. Toutes ces activités doivent pouvoir être menées aussi hors de Paris. Cha-que année, des tournées sont organisées avec le souci d’insérer autant que possible le passage de l’Ensemble dans la vie musicale locale, dans une perspective d’approfondissement et de continuité. Afin d’atteindre ces objectifs, il serait souhaitable que l’Ensemble puisse être présent pendant quelque temps dans une même ville ou une même union, ce qui est encore rarement réalisable ; des résultats intéressants ont été obtenus. Mais dans tous les cas, sa venue peut être préparée utilement à l’avance avec les partenaires locaux. La vie musicale a besoin, de plus en plus, d’organisations capables de s’adapter aux multiples nécessités de notre époque, de se modifier suivant les circonstances ou leur action est requise. Plus souples qu’auparavant, elles exigent de ses membres une attention vigilante aux problèmes de notre temps. S’agissant de musique contemporaine, ils sont nombreux : de l’inadaplation des lieux de concert au vieillissement des formes de concert, des lacunes de l’éducation professionnelle aux abstentions de l’éducation générale, du refus des formes standardisées à l’intrusion de nouveaux moyens sonores, de la prédilection de la société pour son passé à l’insertion du compositeur dans son époque. À ces nombreux problèmes, on ne peut prétendre trouver une solution unique, ni même trouver les solutions définitives. Ce qu’il nous convient de faire, c’est plutôt de proposer un modèle d’activité, activité qui prenne en compte tous ces problèmes, et tienne compte de ces difficultés, Si l’effort principal doit porter avant tout sur le choix délibéré des programmes et sur la qualité des interprétations, il nous faut cependant songer que délivrer, sans autre forme de procès, une oeuvre que nous estimons bonne dans une présentation qoignée ne suffit pas à justifier entièrement l’activité d’un groupe comme l’Ensemble Inter Contemporain. Il faut nous soucier non seulement de ce qui vient d’être fait – ce qui suppose une connaissance et une information refusées à beaucoup – il nous faut également disséminer connaissance et information pour que tombe l’appréhension devant la musique de notre temps : appréhension qui se revête la source principale des rejets et des jugements à priori que l’on est si souvent amené à déplorer. Ayant appris à repérer les chemins qu’ont suivis les compositeurs d’aujourd’hui, ces chemins qui s’appellent « classiques », on sera en mesure de découvrir avec intérêt ce qui est actuel, et de développer un jugement critique fondé sur la valeur et non sur le préjugé. L’intéressant, ce n’est pas de réfléchir sans cesse à l’hypothétique chef-d’oeuvre actuel, en référence à tous les chefs-d’oeuvre d’un passé proche ou lointain. Nous pouvons toujotus faire appel à ces derniers si nous avons besoin de nous raffermir dans une période que nous estimons difficile. (Quelle période n’est difficile pour celui qui la vit ?). Il y a mieux à faire : acquérir l’instinct, le flair qui nous fera saisir les aventures, voire les balbutiements d’aujourd’hui comme les étapes d’un devenir qui devrait tous nous concerner au plus profond de nous-mêmes. L’essentiel n’est-il pas plutot de pouvoir se dire dans l’illumination de l’ins-tant : « Moi aussi, je l’ai vécu ! »
Pierre BOULEZ.
Sylvain CAMBRELING est né en 1948, à Amiens. Il fait ses pre-mières études musicales au conservatoire de cette ville et il entre en 1966 au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris oit il obtient une Première Médaille de Solfège spécialisé et un premier Prix de trombone ténor. Pendant trois ans, il s’occupe de Centres ruraux d’animation musicale puis, en 1971, il entre comme trombone à l’Orchestre de Lyon et suit la classe de Pierre Dervaux à l’Ecole Normale de Musique de Paris et passe avec succès, dès la première année sa licence de direc-tion. En 1974, il est lauréat du Concours de Besançon et devient’ assistant de Serge Baudo. Dès septembre 1975, il est directeur adjoint de l’Orchestre de Lyon.
NUNES : Dawn Wo/STOCKHAUSEN
Kontra Punkte/BERG : Kammerkonzert
